Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

PrÉSentation

  • : La Tanière du Champi
  • : La Tanière du Champi se veut un lieu où l'on se sent bien pour lire (surtout des BD !), discuter, jouer... Au gré des humeurs, lectures, heures de jeu, j'essaierai de vous faire découvrir tout ce qui se cache sur les étagères poussiéreuses de ce petit mo
  • Contact

Cases dans le vent

Vous n'êtes pas sans savoir que, depuis quelques mois, je rédige des biographies d'auteurs de BD pour des l'encyclopédie en ligne des Editions Larousse.

Afin de vous permettre de retrouver plus rapidement l'ensemble de mes contributions, je vais essayer de les lister ici dans l'ordre de leur parution.

Bonne lecture, et n'hésitez pas à me laisser vos avis !

Champi à tout vent

David B. - Edgar .P. JACOBS - Bob de MOOR - Benoît PEETERS - François SCHUITEN - René GOSCINNY - Astérix - Manu LARCENET - HERMANN - Robert CRUMB - Osamu TEZUKA  - Jean-Pierre GIBRAT -





Contacts

1 juin 2014 7 01 /06 /juin /2014 17:14
La traversée du Louvre

"J'ai l'impression de marcher dans une BD géante. [...] Des lecteurs partout. Venus du monde entier. Plus fort que Tintin."

Avant Etienne DAVODEAU et après Nicolas DE CRECY, David PRUDHOMME se jette à l'oeuvre (ah ah) pour arpenter et mettre en cases l'immense institution parisienne.

Ivre d'images et de regards, errant à la recherche de Jeanne qui, emportée par les flots de visiteurs, semble avoir disparu, l'auteur se met en scène chapka et téléphone portable au vent arpentant les 12 km de galerie (les chiffres sont mentionnés en fin d'ouvrage) dans l'espoir de retrouver sa belle.

"Bon. Allez. Je me fais toutes les salles. Au pas de course."

Afin de maintenir son souffle, sans doute, il laisse alors un peu entrer le silence dans ces vastes espaces où le brouhaha règne en maître.

Bulles en moins, le regard peut alors enfin pleinement profiter du spectacle : celui des oeuvres, bien sûr, mais aussi celui des humains.

Des humains qui regardent, dans toutes les positions, dans tous les recoins, par tous les artifices (notamment celui des écrans) et que l'auteur place dans un plaisant jeu de miroirs.

"Dis-moi quelle oeuvre tu évoques, je te dirais qui tu es", pourrait-on penser face à l'incroyable pantomime qui se déroule sous nos yeux : gestes, postures, regards des vivants renvoient bien souvent à ceux des figés.

Corps à corps ou face à face, les formes de chair et de pierre, de peau et de toile se répondent à travers les âges, la patine, les couleurs.

"Nous ne sommes pas tous de la même taille devant les oeuvres."

Et vice-versa : l'admiration des uns, l'amusement des autres, l'indifférence parfois, l'inquisition, la fatigue, l'étonnement, le trop-plein, le rêve, l'ailleurs, l'altérité, la sympathie, le mystère... Innombrables sont les vocables pour qualifier ces éphémères relations qui se nouent et de dénouent sous les ors muséaux.

Même au "pas de course" on ne peut manquer de se faire alpaguer par les séries de couples, de têtes, de corps, de groupes qui se font écho, de part et d'autre des vitrines.

Tous mis en scène par le hasard ou le regard, visiteurs et visités se mêlent, s'échangent, l'art se dissout autant qu'il s'expanse : en véritable maître d'oeil, PRUDHOMME brouille les pistes et les frontières et fait bouillir dans la marmite du musée tous les ingrédients disponibles pour en distiller l'âme complexe.

Son parti pris graphique renforce l'intention : plutôt que d'utiliser des reproductions, il a préféré s'approprier les sculptures et surtout les peintures qu'il met en scène.

Plus de rupture entre toile(s) de fond et acteurs : tout est en un (à l'inverse du procédé employé pour Période glaciaire, par exemple) et la Traversée du Louvre traverse aussi le temps et les corps.

Hormis quelques touches plus vives, les couleurs participent de ce grand rassemblement en baignant les images dans le pas tout à fait blanc, le pas tout à fait noir, le rouge et l'ocre.

Au-delà de l'anecdote nichée dans les similitudes, symétries, échos et références que l'auteur traque avec un plaisir communicatif, c'est presque davantage à une étrange communion qu'il nous convie.

"Ce musée-homme est un vertige. Façon puzzle."

Par la grâce des visiteurs, les fragments peu à peu réunis de ce grand corps chargé d'art et d'histoire reprennent vie.

On ne voit pas le soir tomber sur le Louvre, mais on peut imaginer ce qui se passera la nuit venue.

Alors que, de son côté, l'auteur-narrateur-héros rentre chez lui "avant de perdre la boule", il semble changer peu à peu la réalité dans laquelle il reprend pied en musée figé : affiches sur les murs, fenêtres du métro cadrant les passagers, la norme muséale s'est exportée dans la vraie vie..

A n'en pas douter, en échange, le musée a dû récupérer cette vibration dont les visiteurs, les "réels", l'ont pour un temps chargé, histoire de continuer à palpiter une fois les portes fermées.

L'énergie de la traversée, telle peut-être celle qui circule dans l'accélérateur de particules tapi au sous-sol du musée, n'en finit pas d'agiter l'espace, les formes, les couleurs. L'art.

Plus qu'une histoire de regard, donc.

Une histoire d'essence vitale.

Champimages plus que jamais vivantes.

La traversée du Louvre
La traversée du Louvre
Partager cet article
Repost0

commentaires