J'ai depuis longtemps entendu parler de la célèbre collection "Pour les nuls", vaste entreprise de vulgarisation de tous les domaines, des méandres de
l'informatique à la fabrication des plus beaux macramés, en passant par le vin, la mécanique auto ou le bridge (ne riez pas, une liste exhaustive se trouve par ici, et vous consaterez que j'ai à peine exagéré...).Je ne m'y étais pourtant jamais vraiment penché (loin de moi toutefois la prétention de croire que c'est parce
que je n'en avais pas besoin !).
Il semblerait que L'Histoire de France pour les nuls soit un de leur titre-phare, d'où leur décision d'en proposer une adaptation en BD. En douze tomes précisément.
Voici un petit aperçu du premier, intitulé Les Gaulois.
En une page plus que résumée, la Préhistoire est expédiée : d'une étincelle à la sédentarisation, six cases semblent suffire. Dommage. Se pencher sur les spécificités de la préhistoire "française" aurait pu être intéressant. Mais sans doute moins accrocheur (vendeur ?) que de parler des grands blonds moustachus qui galopent à bride (et braies !) abattue en couverture : nos ancêtres les Gaulois.
Vers le milieu du V°s avant J-C, ces braves chevelus "qui ne craignent pas la mort" envahissent le territoire sur lequel les Celtes se sont installés quelques temps auparavant. Guerres, tueries, mais "il serait injuste de ne montrer les Gaulois que sous certains aspects barbares".
Ouf ! Nos ancêtres n'étaient pas que des sauvages sanguinaires, mais aussi de brillants artisans, des précurseurs en matière de démocratie, et de solides défenseurs de la culture orale.
Tout aurait pu se passer immuablement dans le meilleur des mondes s'il n'y avait eu les Romains, d'une part - qui se font envahir à plusieurs reprises, dans un premier temps, avant de prendre leur revanche - et surtout ces innombrables autres tribus barbares (au sens hellénique du terme) qui ont passé une bonne partie de l'Antiquité à passer et repasser sur l'Europe comme s'il s'agissait surtout d'un grand champ de bataille.
La suite, vous pourrez la lire au fil de ces 48 pages qui condensent mille ans d'histoire environ, de l'arrivée des Gaulois dans ce qui n'est pas encore la France, jusqu'à la mort de Clovis en 511.
Graphiquement, rien à redire : le trait de Gabriele PARMA est classique mais efficace, sans erreurs notables. Il fait certes la part belle aux visages belliqueux et aux scènes de combat, mais l'Histoire s'est, il est vrai, souvent écrite dans le sang.
Les décors ne sont pas aussi dépouillés que ce que l'on pourrait craindre dans ce genre d'album, et la mise en couleur est de facture plus que correcte
Le découpage de Dan POPESCU est lui aussi conventionnel, sans effets particuliers, et donc efficace, garantissant une lecture fluide.
Le scénario est assez dense, les textes nombreux, mais pas autant qu'on pouvait s'y attendre dans cet exercice un peu didactique : certes, les personnages expliquent parfois un peu trop leurs actions et leurs motivations aux lecteurs, mais Laurent QUEYSSI a su distiller les nombreuses informations sans noyer les images. Plutôt appréciable.
Au final, une BD qui pourrait faire écho à la célèbre série l'Histoire de France en BD, éditée par Larousse à la fin des années 70, mais qui ne lorgne pas vers un style trop nostalgique : dessin dynamique, mise en scène rythmée, et données historiques relativement récentes prises en compte. Un peu plus loin de la quasi hagiographie traditionnelle vis-à-vis de nos ancêtres grands, blonds et vigoureux, un peu plus près de la complexité historique des échanges démographiques et des enjeux politiques de l'époque.
Quelques pages de texte complètent l'album par des anecdotes sur les Gaulois, par un petit aperçu de ce qui se passait ailleurs dans le monde à la même époque - un regard élargi plus que salutaire ! - et une petite liste de noms de dieux, par Teutatès !
Bien sûr, on reste dans une approche de l'histoire mettant en avant les événements - surtout les batailles - et les hommes - surtout les chefs de guerre - plutôt que la société dans toute sa richesse, mais qui sait si cette approche-là, souvent présente dans des séries plus précises (Les passagers du vent, de François BOURGEON, pour ne citer qu'elle), ne finira pas par trouver sa place plus largement entre les cases, un jour prochain.
Champimages du temps qui passe.